Crannog

Communication de Monsieur Pierre Abjean à la Société Archéologique du Finistère le 25 janvier 1981

Pierre Abjean
16 rue Michel Le Nobletz
29232 – Plouguerneau

25 janvier 1981

Communication

A 2000 mètres à l’Est de l’agglomération de Plouguerneau et à 230 mètres au-delà du hameau de Ranngrannoc ( carte I.G.N. Plouguerneau 7 – 8 ), en bordure d’un chemin rural et d’un chemin herbu venant, à travers des prairies, de la direction du gros hameau d’Enez-cadec (1), au beau milieu d’une pâture humide arrosée par une source et un petit ruisseau, une photographie aérienne prise par les services de l’Institut Géographique National, en 1966 probablement, montre un site révélé par l’état de la végétation, c’est à dire un « crop-site », ou un paysage archéologique révélé par les différences de coloration du sol, du gris au noir, c’est à dire un « soil-site ».
La prise de vue, qui ma été offerte par un ami en 1969 porte le n° 309 avec les indications 0415 – 0915. Ce n’est qu’en Janvier 1971, après avoir relu « Les Celtes » de Henri Hubert (2) que j’ai soupçonné que le site en question ne pouvait être qu’un « crannog ». Le nom du lieu-dit : Ranngrannoc ne pouvait avoir d’autre signification que celle de « secteur du Crannog ou secteur du village sur pilotis ».
Ces pilotis consistaient en d’énormes blocs de pierre sur lesquels devaient reposer de longues poutres d’assemblage et un plancher. Ils étaient disséminés dans la partie basse de la pâture si bien Que le site pouvait avoir une longueur de 90 à 95 mètres sur une largeur de 40 à 45 mètres avec un vide au centre. Le crannog de Glastonbury a environ 120 mètres sur 95.
Le site révélé par la photo aérienne est piriforme (une reproduction, à votre intention uniquement, ne rend pas suffisament le grisé de l’original).
En Janvier 1971, lors de ma découverte du site, des blocs avaient déjà été déplacés par un engin mécanique deux ou trois ans auparavant, et disposésde part et d’autre d’une haie. Certains blocs, en raison de leur dimension, n’avaient pu être déplacés. Ils sont toujours à l’emplacement où les avaient déposés les constructeurs du crannog.
Une stèle armoricaine de l’âge du fer (3), d’une hauteur de 3 mètres, a été découverte en 1928 près du hameau d’Hellez où elle était enterrée. Sa situation, à proximité d’un crannog, avait sans doute une explication. Elle a été dressée en 1961 au virage de Beg- ar-C’hastell.
Pour moi, le ruisseau devait traverser le village de Plouguerneau en y formant une mare. Ce crannog, si du moins son existence est prouvée, devra être cité dans les travaux traitant de la présence des Celtes en Armorique à une époque très ancienne. D’ailleurs il est très probable que d’autres sites du même genre existent sur le territoire de Plouguerneau. Pour ne citer que quelques uns, un site existerait à 150 mètres’environ du hameau du Nahont ( naon en breton) ( carte I.G.N. Plabennec 3 – 4 ) au Sud-Est de Plouguerneau, ou, si on préfère, au Nord-Ouest du bourg de Kernilis. Des traces apparaissent à Lost-an-aod, au fond de l’anse de Kelerdut, au Nord-Ouest de l’agglomération et aussi à Kerily, à Kergueo ( Kergeo, en breton) ainsi qu’à Mesquéau ( Meskeo ) et enfin à Kastell-ar-ran (hameau non inscrit sur la carte I.G.N.)
Tous ces vestiges sont situés dans des prés humides.
Je joins à cette communication un relevé du cadastre au 1/1000 du lieu, un deuxième relevé de situation au 1/5000 et une reproduction unique par photocopie de la photographie aérienne, pour rendre compte de cette découverte(*).

(1) Chemin que je pense être un tronçon de la voie romaine Vorgium-Vorganium c’est à dire : Carhaix – Saint Cava, près de Lilia, après sa traversée du bourg de Plouguerneau.
(2) « Les Celtes » par H. Hubert chez Albin-Michel. Paris 1950 ; tome 1 p.26
(3) Photographie parue dans le n° 11 Juillet – Août 1975 de la revue : « Les dossiers de l’archéologie » page 73, sous le n° 2.

(*)avec preuve à l’appui, heureux d’avoir pu contribuer dans la mesure de mes moyens à la Protohistoire de la Bretagne et enrichir celle de Plouguerneau en particulier.
D’autres sites méconnus pour le mornent existent à Plouguerneau et devraient faire l’objet d’une étude sérieuse.

Accord de la Société Archéologique du Finistère

Plan proposé par Pierre Abjean :