Saint Herbot

SAINT HERBOT
Moine et thaumaturge – Protecteur des bêtes à cornes.

 

 

« Aotrou Sant HERBOT beniget
A greiz va c’halon me ho ped
Da skuilha ho benediksion
War al laez a c’horaou
Evit ma savo kalz dienn
Da gountanti va bourc’hizienn
Ha da vloaz, mar bezan e buhez
Me a bromet d’eoc’h eul leue »

« Monsieur Saint HERBOT béni,
Du fond du cœur je vous prie
De répandre votre bénédiction
Sur le lait que je trais,
Pour que la crème se lève abondante
Afin de satisfaire mes maîtres.
Et l’année prochaine, si je suis en vie,
je vous promets un veau ».
(Chant ancien de St-Herbot)

Et l’on disait aussi à Plouguerneau: » Pemp guenneg da zant Herbot ma vez leun a amant er ribot »( Cinq sous à St-Herbot si j’ai plein de beurre dans ma baratte).
En vérité, nous ne savons pas grand chose sur Saint HERBOT, surnommé Eghez ( le menton long). Un document retraçant toute sa vie et conservé autrefois à Berrien , dans un riche reliquaire dans lequel avait été déposée sa tête, a été volé par des soldats anglais pendant la guerre de succession de Bretagne. Un texte du 14ème siècle sur sa vie n’est qu’un abrégé du document disparu.

Selon certains chroniqueurs, St Herbot est né au 6ème siècle en Grande Bretagne, de parents nobles et très pieux. Tout jeune, il se voua au renoncement et à la recherche de la perfection. Avec l’accord de ses parents, il vint s’installer en Armorique.
Pour d’autres auteurs, le saint a été peut-être l’un de ces religieux bretons qui au 11ème ou 12ème siècle ont choisi de se retirer du monde, pour rappeler au clergé décadent de l’époque le sens de la prière et du détachement évangélique.
Quoiqu’il en soit, Herbot séjourna dans différents endroits de la Basse Bretagne et vécut longtemps à Berrien. Il installa son ermitage dans un vallon, entre des versants boisés au pied desquels coule la rivière Ellez , affluent de l’Aulne. Il mena une vie humble et rude, élevant quelques bêtes et travaillant les champs pour assurer sa nourriture. Il mourut à l’endroit où s’élève sa chapelle qui, dès le 14ème siècle, fut un prieuré des carmes de Rennes.
La tradition populaire attribue de nombreuses conversions et divers miracles à Saint Herbot. On raconte par exemple l’histoire du géant GAWR(ou Gueor ou encore Caervent) qui habitait un château sur le promontoire du Rusquec . Gawr, cruel et jaloux, terrorisait son voisinage et séquestrait son épouse. Il ne fut, dit-on, bon qu’une fois dans sa vie: quand il accueillit Herbot qui cherchait un coin pour vivre en paix. Il lui avait même prêté une paire de bœufs pour l’aider à construire son ermitage et à labourer un lopin de terre . On affirme même que les bœufs ne voulaient plus le quitter . Mais les prières du saint finirent par énerver Gawr qui les considérait comme une perte de temps et voyait d’un mauvais œil l’ascendant que prenait Herbot sur les paysans des alentours. Il décida donc d’en finir: une nuit, armé d’un énorme gourdin, il s’introduisit chez l’ermite pour le tuer. Mais, au moment même où il levait son arme, le sol se déroba sous son pied, il perdit l’équilibre et vint s’empaler sur la flèche de la chapelle. On l’enterra sous d’énormes blocs de pierre (au lieu dit le Begawr) et on dit que la tour de St-Herbot est restée depuis sans flèche !
Après la mort du saint, son ermitage devint un centre de pèlerinage très fréquenté car son culte s’était répandu très largement dans le monde rural de la Basse Bretagne. On l’honorait comme le protecteur des bêtes à cornes en raison de l’ascendant qu’il avait eu sur les animaux de la ferme. Une chapelle fut bientôt construite en son honneur mais elle fut détruite pendant la guerre de succession de Bretagne. Le Pape, instruit de la réputation de St-Herbot, promit en 1389 des indulgences à tous ceux qui travailleraient à la reconstruction de sa chapelle. La reconstruction, poursuivie au 15ème siècle grâce aux dons d’Anne de Bretagne, grâce à la générosité des familles seigneuriales et à celle de tous les fidèles, fut pratiquement achevée au 16ème siècle.
L’église gothique de Saint-Herbot , dont il est le patron et où on célèbre le pardon le dimanche de la Sainte Trinité, est considérée comme une perle d’architecture. Au dos de la croix du calvaire, St Herbot présente ouvert le livre des écritures. Le tombeau du saint est à l’intérieur du chœur qui est fermé par un chancel. Herbot est représenté allongé sur une dalle de granit reposant sur quatre piles carrées. Il est vêtu d’une robe à longs plis et d’un camail à capuchon. Il a une longue barbe, les yeux ouverts, les mains jointes sur la poitrine. Il tient sous le bras gauche un bourdon( bâton de pèlerin surmonté d’un ornement en forme de pomme) et sous le bras droit un livre. De chaque côté de l’entrée du chancel, deux tables de pierre sont destinées à recevoir les offrandes: mottes de beurre d’un côté, de l’autre touffes de crin arrachées à la queue des vaches. Jadis ces poignées de crin étaient vendues aux enchères pour être utilisées dans l’industrie. Le chancel de St-Herbot est, dit-on, l’un des plus grands chefs d’œuvre de la Renaissance bretonne.
La renommée du saint a grandi tout au long des siècles. Neuf chapelles lui ont été consacrées dans le diocèse et plus d’une centaine de statues le représentent comme intercesseur privilégié pour les bêtes à cornes.
Sa statuette à Plouguerneau le représente vêtu de bure, l’Evangile dans la main gauche et un bâton dans la droite. Une vache est accroupie à ses pieds.

Texte de Noël L’Hour