Saint Hervé

SAINT HERVE – SANT HERVE
Ermite – Patron des bardes

Jezuz, pegen braz’ve plijadur en ene
Pav’vez e gras Doue hag en e garante

Doriou ar baradoz digor ouz va gortoz
Ar zent, ar Zentezed deut d’am digemeret

Pegen brao ‘vo kleved Jezuz o lavared: « Deut,
va zervicher mam,da gaoud Doue ho Tad ».

En oll boaniou kaled a gorf hag a spered,
me’zonjo deiz ha noz e gloar ar baradoz
(Cantique du Paradis)

HERVE est le saint breton du Léon. Il est le patron des bardes et des chanteurs de tous temps. Des documents du 9ème et du 13ème siècles font de lui un contemporain de St-Goueznou et de St-Majan, ce qui le situe au 6ème siècle.

Son père, HYVARNION (ou HERVIAN) était lui-même barde. Originaire de Grande Bretagne, chrétien, il émigra en France en 515 pour fuir l’invasion saxonne. Musicien, compositeur de ballets et de chansons, il était sans doute très connu car il fut invité à la cour du roi franc CHILDEBERT, successeur de Clovis. Mais il souhaita, après 4 années passées à la cour royale, rejoindre son pays natal, car il avait promis de consacrer sa vie à Dieu. Childebert s’inclina devant sa volonté mais lui conseilla de passer par l’Armorique avant de rallier son île.

Aux derniers jours de son voyage en terre bretonne, Hyvarnion, qui était hébergé par Jugduval, lieutenant du roi en Basse Bretagne, eut une nuit un songe: un ange lui proposant en mariage une jeune fille, Rivanone, lui précisant qu’il la rencontrerait le lendemain et que de leur union naîtrait un grand serviteur de Dieu. Le lendemain à Landouzan, prés du Drennec, Hyvarnion rencontra en effet Rivanone venue puiser de l’eau à une fontaine. Elle avait eu un songe analogue, elle qui s’était également vouée à Dieu après la mort de ses parents. Landouzan( ou Lannuzan)est un lieu situé au bord d’une voie romaine allant de Carhaix à Plouguerneau.

Le mariage fut conclu rapidement et les nouveaux époux allèrent demeurer chez Riovaré, frère de Rivanone. Le lendemain même du mariage, Rivanone dit à son époux: « Si j’ai un fils, je demande au Dieu tout puissant qu’il ne voit jamais la fausse et trompeuse lumière de ce monde ». Et Hyvarnion, malgré sa peine, de lui répondre « Qu’il ait au moins la vision des splendeurs célestes ».

Selon certains chroniqueurs, Hyvarnion quitta son épouse le jour même pour mener une vie d’ermite et mourut 5 ans plus tard, en odeur de sainteté.

HUVARNE, devenu plus tard HERVE, leur fils, naquit aveugle en 521 à Lanrioul, en Plouzévédé. Sa mère l’éleva chrétiennement jusqu’à l’âge de 7 ans, lui apprenant prières et chants. Puis elle le confia à un sage nommé ARZIAN et se retira dans un couvent.

Hervé fut instruit par Arzian pendant sept années. Adolescent, il se fit connaître par quelques miracles, faisant taire par une prière des grenouilles dont les coassements l’importunaient, demandant à Dieu de rendre nains quelques jeunes pâtres rencontrés en chemin et qui s’étaient moqués de son infirmité ! Certains auteurs soulignent que le futur saint manifestait alors un caractère irritable et assez revendicatif. On verra plus loin qu’Hervé fit preuve plus tard du même caractère ombrageux.

Après ses années d’étude, Hervé voulut retrouver sa mère et s’adressa à son oncle Urfold (appelé Wlphoëdus dans les anciennes chroniques). Ce dernier qui vivait quelque peu en ermite, accepta de partir à la recherche de Rivanone et il confia la garde de son logis à Hervé et à son jeune guide Guic’haran. Un jour , ce dernier après avoir travaillé aux champs, remit son âne dans une pâture. Un loup survint qui tua l’âne. Averti par son guide, Hervé pria Dieu de lui remettre le loup pour qu’il prenne la place de l’âne. Et le miracle s’accomplit, dit la légende. Le loup, apprivoisé, fut désormais attelé à la charrue pour labourer les champs et accepta de porter les fardeaux comme le faisait l’âne.

Après la mort de sa mère, survenue peu de temps après leurs retrouvailles, et la mort de son oncle, Hervé, libéré de toutes attaches familiales, va parcourir la Bretagne avec un groupe de moines et d’élèves qui se sont rassemblés autour de lui. Il est mendiant et aussi poète et musicien, car son père lui a transmis son don de barde. Il part finalement pour Kastel-Paol pour obtenir de l’évêque l’autorisation de s’installer d’une façon définitive. L’évêque, St-Houardon, veut lui conférer les ordres mais Hervé n’accepte que les ordres mineurs et il restera exorciste durant toute son existence.

Hervé pria Dieu de lui désigner une lieu propice à son installation. Dieu lui conseilla d’aller vers l’Ouest « là où je te dirai, par deux fois, de te reposer, là tu t’installeras ». Un jour enfin, Hervé entendit une voix céleste lui dire à deux reprises: » Chommit aze ». Le monastère de St-Hervé fut construit sur l’emplacement actuel de l’église de Lanhouarneau. Auparavant, il avait fallu discuter avec le propriétaire du terrain, un certain Innoco, car le champ était couvert de blé encore vert. Hervé promit à Innoco que ce blé vert, coupé par lui et ses moines, serait ramassé et lui serait rendu sec et mûr au temps de la moisson: ce qui arriva par la grâce de Dieu.
Hervé fit jaillir une source à Lanhouarneau, comme il en fit jaillir d’autres( par exemple sur le Menez Bré )en frappant le sol de son bâton. Le saint chassa à plusieurs reprises le diable qui, en prenant forme humaine, s’était introduit dans des cours royales ou dans des monastères.

Il entretenait d’excellentes relations avec St Houardon, évêque de St Pol de Léon. Ce dernier lui demanda un jour de l’an 548 de l’accompagner sur le Menez Bré, prés de Louargat, où devait être jugé par tous les évêques de Bretagne le comte Comorrus qui avait tué sa femme et son enfant. Hervé, aveugle , marchant à pied, mit son évêque en retard. Un des prélats se fâcha contre ce retard et ce moine en haillons. A l’instant, il est frappé de cécité et tombe à terre, le visage couvert de sang. On supplie Hervé de le guérir, ce qu’il fait après avoir fait jaillir une source. Une chapelle a été édifiée à cet endroit.
A leur retour, Houardon et Hervé, après 3 journées de jeûne et de prière, eurent la grâce extraordinaire de voir le ciel entrouvert et d’apercevoir tous les saints du paradis.

Saint Hervé est mort en l’an 566 à Lanhouarneau. Il avait été averti de sa mort 6 jours auparavant et il avait demandé à St Houardon de venir l’assister dans ses derniers moments.
Ses reliques auraient été transférées plus tard à Brest, puis à Nantes et à Rennes.
Selon la tradition, il nous a légué le Cantique du Paradis, transmis en Bretagne de génération en génération.

Dans le diocèse, plusieurs chapelles lui sont consacrées et de nombreuses statues le représentent, presque toujours accompagné de son jeune guide et du loup apprivoisé. Il est vénéré à Plomodiern sous le nom de St Mahouarn.
A Plouguerneau, dans la collection des petits saints, il est représenté en tenue de Père Abbé, le loup accroupi à ses pieds. Saint Hervé est fêté le 16 juin.
On lui attribue trois aphorismes bretons qui restent toujours d’actualité.

Texte de Noël L’Hour


Aphorismes de Saint-Hervé

Sur l’instruction :

Gell eo diski mabik bihan eged dastum madou d’ezhan
Mieux vaut instruire petit enfant que de lui amasser des richesses.

Sur le travail :

An den iaouank en diegi a zastum poan var benn kosni
Le jeune homme dans l’oisiveté amasse peine pour sa vieillesse

Sur l’obéissance :

An neb a zizent ouz ar stur ouz ar garrek a zento sur.
Qui désobéit au gouvernail, pour sûr à l’écueil obéira.

On trouvera ci-après une prière concernant ce saint breton :

« Seigneur,
Tu as donné à saint HERVE l’aveugle
Le pouvoir de commander aux forces du mal,
Le désir de chanter ton nom
Et la joie de voir, dès cette terre,
La lumière de ton paradis.
A sa prière, enracine-nous dans ta lumière
Et fait grandir en nous le désir de Te louer. »

« Aotrou Doue, d’an den dall sant Hervé
Ho-peus roet galloud da veza mestr
War nerziou an droug,
Ar c’hoant da veuli hoh Ano,
Hag al levenez da weled, hag hen c’hoaz er bed-man,
Sklerijenn ho paradoz ;
Dre nerz e bedenn, or gwriziennit en ho sklerijenn,
Ha lakit da greski ennom ar c’hoant d’ho meuli.
Dre or Zalver Jezuz Krist. »